Les salariés de la petite enfance se sont mobilisés dans toute la France le 2 février à l’appel du collectif Pas de bébés à la consigne, relayé par la fédération de l’action sociale FNAS-FO. Ils s’opposent à la réforme des modes d’accueil visant à augmenter le nombre de places sans moyens supplémentaires, dans une logique de productivité.

Les bébés ne sont pas des sardines, pas de bébés à la consigne !. C’est en scandant ce slogan et en chantant que plus d’un millier de manifestants, certains avec des poussettes, ont défilé le 2 février à Paris. Partis de la place Saint-Sulpice, ils ont marché jusqu’au ministère de la Santé.

L’appel à la grève lancée par le collectif Pas de bébés à la consigne et relayé par la fédération de l’action sociale FNAS-FO a été largement suivi. Des actions ont été organisées dans plus d’une trentaine de villes sur le territoire.

Ces manifestants s’opposent à la réforme, des modes d’accueil des jeunes enfants, en application de la loi d’Accélération et Simplification de l’Action Publique (ASAP) publiée au JO le 8 décembre 2020. La réforme Adrien Taquet, du nom du secrétaire d’État à l’Enfance et à la Famille, doit être mise en œuvre progressivement, par ordonnances, au cours du premier semestre 2021.

L’objectif de la réforme est d’augmenter le nombre de places d’accueil de jeunes enfants sans moyens supplémentaires, on réduit le personnel de prise en charge et on élargit les horaires d’ouverture, dénonce Pascal Corbex, secrétaire général de la fédération FNAS-FO, présent dans le cortège parisien. Cela engendrera une dégradation de la qualité d’accueil des enfants et des conditions de travail des salariés.

Un professionnel pour 6 enfants

Il est ainsi prévu que les capacités d’accueil des micro-crèches passent de 10 à 12 places. Les crèches pourront accueillir tous les jours 15% d’enfants en plus de la norme. Tôt le matin et tard le soir, un seul professionnel pourra accueillir jusqu’à trois enfants, contre deux professionnels dès le premier enfant actuellement. Le taux d’encadrement par un professionnel va passer de cinq à six enfants, même pour les bébés. Et il y aura la possibilité d’avoir 15% d’apprentis dans l’effectif des encadrants. Les manifestants dénoncent également la réduction de la surface minimale par enfant de 7 m² à 5,5 m² en zone urbaine dense.

Il y aura trop d’enfants et pas assez de professionnels, ça va devenir du gardiennage, alerte Pauline, venue de Versailles. Nous n’aurons plus le temps de préparer des activités ni de prendre les enfants par petits groupes. Il n’y aura de bien-être ni pour les enfants, ni pour les personnels. Le ras-le-bol est général. A côté d’elle, sa collègue arbore une pancarte : Comment veux-tu que j’apprenne à marcher, on est tellement serrés.

On a envie de bien faire notre métier

Un peu plus loin dans le cortège, deux collègues venues du Val-de-Marne. L’une est éducatrice, l’autre auxiliaire en crèche multi-accueil. On est en colère car le gouvernement ne nous entend pas, dénoncent-elles. Avec cette réforme, on n’aura plus le temps d’individualité avec les enfants, ça va être à la chaîne, comme dans une usine à bébés. On a envie de bien faire notre métier mais on est malmenées, car il faut du rendement.

La FNAS-FO s’oppose à cette logique. Elle demande que le gouvernement recule sur la réforme Taquet et revendique un financement des postes qualifiés à hauteur des besoins, avec la revalorisation des rémunérations. Elle rappelle aussi que dans le contexte de la pandémie, les salariés de la petite enfance ont assuré la continuité de l’accueil des jeunes enfants. C’est pourquoi la FNAS-FO revendique l’extension du Ségur de la santé à ce secteur et une augmentation de salaire de 183 euros.

Clarisse JOSSELIN – Journaliste à L’inFO militante

Le 3 février 2021