La Chambre des députés à Versailles le 16 juin 1877. Les républicains affrontent les monarchistes et les bonapartistes. © Jules-Arsène Garnier

Depuis la fin du XIXe siècle en France, il est d’usage qu’entre Noël et le Nouvel an les joutes parlementaires, politiques, s’arrêtent l’espace d’une dizaine de jours. Mais pour autant, cet appel à oublier ses soucis et à goûter aux chocolats ne fait pas disparaître la crise sociale.

Depuis la fin du XIXe siècle en France, il est d’usage qu’entre Noël et le Nouvel an les joutes parlementaires, politiques, s’arrêtent l’espace d’une dizaine de jours. Mais pour autant, cet appel à oublier ses soucis et à goûter aux chocolats ne fait pas disparaître la crise sociale.

T out commence à Noël 1874 au sein de la Chambre des députés de la toute jeune et fragile IIIe République, née en pleine guerre avec l’Allemagne et qui connaîtra à ses débuts la sanglante Commune de Paris. Dans l’hémicycle, trois courants s’affrontent : les républicains, les monarchistes et les bonapartistes. Les premiers sont majoritairement à la droite de cette tendance. Les socialistes y sont encore minoritaires. Les seconds sont divisés en deux entre une aile ultra ― rêvant de revenir avant 1789 ― et une autre prônant une monarchie constitutionnelle comme celle de Louis-Philippe entre 1830 et 1848. Quant aux troisièmes, il s’agit du reliquat des fidèles de Napoléon III, battu en 1870 à Sedan.

La jeune IIIe République n’a toujours pas de Constitution. Le 24 décembre 1874, les députés républicains veulent que les débats reprennent dès le 28 (après la trêve de Noël) pour adopter au plus vite la nouvelle Constitution qui inscrirait dans le marbre la République. Les monarchistes jouent la montre et proposent une trêve jusqu’au 11 janvier sous des prétextes fallacieux. Le duc Albert de Broglie, chef de l’opposition monarchiste au Parlement, s’en explique : On convint de ne pas troubler par nos débats la reprise d’affaires commerciales qui, à Paris et dans les grandes villes, précèdent toujours le jour de l’an.

Finalement les débats parlementaires reprennent le 5 janvier, et à la fin du mois la Constitution est adoptée. Elle disparaîtra en juillet 1940 à l’arrivée de Pétain.

Drôle de trêve

Lorsque les députés mettent leurs querelles en sourdine pour des raisons tactiques, la presse satirique de l’époque invente l’expression trêve des confiseurs. Un certain T. Pavot écrit en septembre 1898 dans le mensuel L’intermédiaire des chercheurs et curieux : Les confiseurs jubilent, profitant de la suspension des hostilités à la Chambre, et cette tranquillité dont ils bénéficient s’est appelée la trêve des confiseurs.

Cette fameuse trêve a été officiellement calée dans l’agenda des deux chambres (Assemblée nationale, Sénat) du 31 décembre après la dernière séance jusqu’au deuxième mardi du mois de janvier. Ce concept de trêve a perduré, devenant aujourd’hui synonyme d’une frénésie d’achats, chez les confiseurs et autres marchands. Une constante demeure : il faut en avoir les moyens !

Christophe ChicletJournaliste à L’inFO militante

Le 20 décembre 2020